Le Singe hurleur, efficace réveille-matin
Quatre espèces de primates vivent au Costa Rica : singe hurleur, singe araignée, capucin et singe écureuil. Le singe hurleur à manteau Alouatta palliata, parfois appelé alouate, reste l'un des plus emblématiques de la forêt tropicale, et pour cause : dès l'aube, son puissant et terrifiant rugissement se fait entendre sur plusieurs kilomètres à la ronde, au-dessus de la canopée, ce qui nous réveille à coup sûr, ou tout au moins nous surprend ! Le singe hurleur est folivore et passe énormément de temps à se reposer pour digérer la cellulose du kilo de feuilles, très peu énergétique, qu'il ingère quasiment chaque jour. Son activité réduite le pousse ainsi à éviter les conflits avec d'autres groupes de singes, et se faire entendre puissamment est un moyen dissuasif d'affirmer son territoire ! L'os hyoïde des hurleurs mâles, situé près des cordes vocales (et très important chez l'Homme pour la parole ou la déglutition), est 25 fois plus grand que chez les autres singes et lui permet d'amplifier son cri, la gorge jouant alors le rôle d'une caisse de résonance. Même si cette prouesse sonore est destinée aux autres singes hurleurs, tous les habitants de la jungle en profiteront !
Le Basilic vert, un dinosaure émeraude qui marche sur l'eau
Fréquemment rencontré lors des déambulations nautiques dans les canaux de la forêt humide de Tortuguero, le Basilic vert Basiliscus plumifrons est un grand lézard à la robe vert émeraude du plus bel effet et à l'iris jaune orangé. Les mâles sont ornés de trois crêtes sur la tête, le dos et la queue qui accentuent leur allure de petit dinosaure. Mais ce qui caractérise davantage ce drôle de reptile à la fois arboricole et aquatique, c'est son comportement de fuite. Souvent perché sur un tronc ou une branche flottante, en cas de danger il se précipite vers la berge en courant sur l'eau, littéralement ! Pour accomplir ce prodige il se dresse et utilise ses pattes arrière, sa grande vitesse et sa légèreté, ce qui le maintient hors de l'eau et peut justifier le nom de Jesus-Christ qu'on lui donne souvent. Un spectacle éphémère, mais à ne pas manquer...
Les Paresseux et leur drôle de vie au ralenti
Suspendue à l'envers en haut d'une branche, une silhouette se distingue à peine sur le fond de la voûte forestière. Il faut un regard avisé pour la repérer car elle est immobile, ou quasiment. C'est une boule de poils, d'environ 60 cm pour 4 kg. Il est d'autant plus difficile de voir cet animal que sa fourrure est verdâtre, le dissimulant davantage dans le feuillage. C'est grâce à une symbiose avec des algues que le mammifère arbore cette teinte verte : ces micro-organismes se logent dans son pelage, l'hôte y trouve un camouflage. Le paresseux à gorge brune, ou aï, possède trois griffes à l'extrémité des membres antérieurs, c'est la raison pour laquelle il est souvent appelé paresseux à trois doigts ou tridactyle. En revanche, son cousin le paresseux d'Hoffmann, ou unau, est didactyle : c'est le paresseux à deux doigts. Tous deux habitent les forêts tropicales humides du Costa Rica, et ont des moeurs relativement semblables.
Ce sont des mammifères arboricoles dont l'activité est très réduite : ils dorment jusqu'à 20 heures par jour ! Si l'on devait résumer la vie des paresseux en un mot, ce serait certainement la « digestion », leur principale occupation. Compte tenu de leur régime essentiellement folivore, le transit intestinal de ces animaux primitifs est l'un des plus lents des mammifères, ce qui explique leur faible dynamisme (ils se déplacent tout au plus de 5 mètres par minute). Alors qu'une vache met 5 jours à digérer des kilos d'herbe, les paresseux ont besoin de plus de 4 semaines pour assimiler le contenu de leur gros estomac compartimenté ! Incapable de digérer seuls les feuilles coriaces qu'il ingèrent, ils vivent en symbiose avec des bactéries qui leur permettent de dégrader la cellulose des végétaux. Mais ces bactéries ne sont réellement actives qu'en présence de chaleur : les paresseux doivent donc absolument trouver régulièrement le soleil pour assurer leur transit alimentaire, d'autant que leur métabolisme lent les a dotés d'une température interne plus basse que celle des autres mammifères. C'est aussi la raison pour laquelle ils sont munis d'un pelage épais, et dorment en boule. Par mauvais temps prolongé, il arrive qu'ils meurent de froid.
Environ une fois par semaine, l'unau et l'aï doivent descendre de l'arbre dans lequel ils passent la majeure partie de leur temps. La raison est simple : ils doivent uriner et déféquer, mais ils le feront au pied d'un arbre voisin. Ils perdront alors jusqu'à un tiers de leur poids. Parmi les hypothèses émises, on pense que grâce à cette habitude ils orientent les prédateurs vers de mauvaise pistes odorantes : un puma, un jaguar ou un ocelot seraient en effet capables de grimper aux arbres pour les chasser s'ils détectaient leur odeur. C'est pourtant au sol que les paresseux s'exposent au danger et deviennent des proies très vulnérables : totalement inadaptés à la marche terrestre, ils prennent de grands risques. Toutefois, ils nagent très bien, on les voit parfois traverser une rivière pour trouver de nouveaux arbres et en dévorer les feuilles, tranquillement...
La Rainette aux yeux rouges, star du Costa Rica
Par son extravagance chromatique et ses positions très photogéniques, cette étonnante rainette est peut-être la grenouille la plus célèbre au monde. Devenue la mascotte du Costa Rica, on la retrouve sur les tee-shirts, casquettes, mugs. et... en couverture des livres. Cette petite grenouille de 7 cm est en réalité nocturne. Aux heures chaudes, elle dort cachée sous une palme, puis c'est au crépuscule qu'elle dévoile sa livrée de clown : gros yeux rouge vif, flancs striés de jaune, bleu et blanc, doigts orange, un festival de couleurs ! Arboricoles, les grenouilles aux yeux rouges se reproduisent dans la canopée, les têtards se développent dans une petite réserve d'eau, trou dans l'écorce d'une branche ou coeur d'une broméliacée.
L'Ara macao, perroquet multicolore
Les perroquets sont parmi les oiseaux les plus connus des forêts tropicales, grâce à leur plumage très coloré. En Amérique centrale et dans la forêt amazonienne, l'un d'entre eux se distingue particulièrement : l'Ara macao, au corps écarlate et aux ailes bleues, jaunes et rouges. C'est l'un des plus grands perroquets : près de 90 cm du bout du bec au bout de la queue, et une envergure moyenne de 120 cm ! Son bec puissant lui permet de décortiquer amandes et noix, qu'il décroche des arbres avec ses pattes. Chassé pour ses plumes et sa capacité à parler, il est aujourd'hui menacé d'extinction mais encore bien présent sur la côte Pacifique du Costa Rica, où il peut vivre longtemps, 80 ans en moyenne et jusqu'à 100 ans !
Les Colibris, bolides du sous-bois
Les colibris regroupent plusieurs genres et espèces différents. Ce sont les plus petits oiseaux du monde, le plus léger pèse 2 g et la plupart n'excèdent pas 10 g ! Uniques au continent américain, ils sont souvent affublés du nom d'oiseaux-mouches : avec un son de gros bourdon ou de hanneton, leurs ailes battent plus de 60 fois par seconde ! D'autres adaptations sont remarquables chez ces oiseaux : à proportions gardées, les colibris ont le plus gros cerveau et le plus gros cœur du règne animal. Leur cœur bat 500 à 1 200 fois par minute. Ils volent environ 20% de leur temps (en avant, en arrière ou sur place) à une vitesse pouvant atteindre plus de 70 km/h. Inconvénient toutefois, ils ne peuvent pas marcher mais juste se poser. Ils se nourrissent à 70% de nectar, et le reste d'insectes pour des apports protéiques. Ils brûlent 6 000 à 12 000 calories quotidiennement et doivent ingérer au minimum l'équivalent de leur propre poids chaque jour...étonnant non ? Du coup, ce sont des milliers de fleurs que les colibris visitent chaque jour, selon un trajet régulier. Ils n'ont pas pour autant le sens de l'odorat : les fleurs jouent sur les couleurs et la quantité de nectar pour attirer ces oiseaux et laisser quelques grains de pollen sur leur plumage coloré. Attention toutefois à leurs coloris : les couleurs des colibris sont majoritairement produites par la réflexion de la lumière et non par leur pigmentation. Autrement dit, certains reflets métalliques tromperont l'œil de l'observateur.
49 espèces de colibris ont été recensées au Costa Rica, et portent des noms vernaculaires qui correspondent à la forme ou à la taille de leur bec, à la couleur de leur gorge, de leur ventre ou de leur queue, au nom de leur découvreur... Brillant fer-de-lance, Campyloptère violet, Colibri à ventre châtain, Ariane charmante, Porte-lance de Louise, Ermite à gorge rayée ou encore Saphir d'Elicia sont leurs petits noms, qui ne manquent pas de poésie !
Photos : Sylvain Mahuzier